La chorale anarchiste de Lausanne a 5 ans !

Lors de la dernière Sainte-ACAB (13.12.2023), la chorale anarchiste de Lausanne a fêté ses 5 ans à l’espace autogéré en nous offrant un sublime concert. Des chansons de l’histoire militante des 4 coins du globe, scandées par 4 groupes de voix (basses, ténor, altX, sopranX). Chaque chanson est présentée ci-dessous. Les répétitions ont lieu 1 lundi sur 2, à l’espace autogéré à Lausanne. Que cet enregistrement régale vos oreilles !

Présentation de la chorale et intro « Siamo tuttX antifascistX »

LE SITE DE LA CHORALE ANARCHISTE DE LAUSANNE
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00:00 : Intro « Siamo tuttX antifascistX » (oui, on le remet parce qu’on l’aime beaucoup)
00:33 : In ale gasn (1)
03:33 : A la huelga (2)
06:45 : Clémence en vacances (3)
11:24 : Cinturini (4)
14:19 : Canción sin miedo (5)
17:17 : Addio Lugano bella (6)
20:00 : Allez les gars (7)
22:45 : La danse des bombespar la chorale d’Yverdon (8)
25:02 : Les archers du roi (version sans-papiers) (9)
28:00 : Bruceremo le chiese (10)
30:30 : Adieu paure Carnavàs (11)
35:55 : Il galeone (12)
39:59 : Soroode Zan (13)
42:10 : La java des bons-enfants (14)
44:09 : La révolte (15)
48:22 : La vie s’écoule (16)
51:17 : Stornelli d’esilio (17)
52:35 : Je suis fille d’Amazigh (18)
56:05 : Belle ciao (19)

(1) In ale gasn : Arrangé pour le fi lm « Free Voice of Labor : The Jewish Anarchists » (1980) par le compositeur et directeur
de théâtre yiddish Zalman Mlotek (né en 1951), cette chanson est un mélange de deux chants qu’il avait
appris de sa maman, Eleanor Chana Mlotek (1922-2013) : « In Ale Gasn » (« Dans toutes les rues ») et
« Hey Hey Daloy Politsey » (« Hey, hey, à bas la police »). La première partie est un chant révolutionnaire
du Bund (mouvement ouvrier révolutionnaire juif de la fi n du XIXe siècle) qui appelle à la grève ; tandis
que la seconde est un chant de la révolution russe de 1905 qui se déchaîne contre Nicolas II et sa police,
composée d’un couplet souvent improvisé par un·e soliste et d’un refrain chanté collectivement.


(2) A la huelga : Composée par Chicho Sánchez Ferlosio en 1963, « A la huelga » (« À la grève ») est à l’origine une chanson
de résistance contre la dictature franquiste et le fascisme. Cette version, qui en reprend la mélodie avec
de nouvelles paroles, a été popularisée en Espagne à l’occasion de la grève de femmes et de personnes
LGBTIQ+ qui a rassemblé le 8 mars 2018 des centaines de milliers de féministes.


(3) Clémence en vacances : Écrit et interprété par Anne Sylvestre en 1978, cette chanson parle des femmes qui décident d’arrêter de
faire les tâches ménagères qu’elles se sont coltinées seules et dans l’invisibilité. Clémence laisse sans
remord à son mari les lourdes tâches quotidiennes qu’elle assumait seule depuis toujours. Chanson rebelle
d’oisiveté subversive.


(4) Cinturini : « Tiketeta », c’est le bruit des machines à coudre. Cette chanson en dialecte d’Ombrie parle des ouvrières du
textile d’une usine de sacs de jute (activité très malodorante), l’usine fondée par l’ingénieur Centurini (pro-
noncé « Cinturini ») à la fin du XIXe siècle à Ternim, près de Pérouse. Les ouvrières dénoncent les préjugés
des hommes à leur propos et affirment leur valeur et leur beauté, en envoyant balader ceux qui les méprisent.


(5) Canción sin miedo : «Canción sin miedo» est une chanson composée en 2020 par Vivir Quintana, autrice et compositrice
mexicaine. Diffusée dans le monde entier dans une version où elle chante accompagnée par El Palomar,
un chœur de femmes, et par la chanteuse chiliene Paz Court, ce chant est devenu un véritable hymne
féministe, contre les feminicides au Mexique et partout ailleurs.


(6) Addio Lugano bella : « Addio Lugano Bella » a été écrite en 1895 par le poète anarchiste italien Pietro Gori (1865-1911). Reprenant
la mélodie d’une chanson populaire italienne (« Addio a San Remo bella »), le texte évoque le destin des
anarchistes italien·nes réfugié·es en Suisse. Le groupe réuni à Lugano autour de Gori, qui avait été accusé
d’avoir organisé l’assassinat du président français Sadi Carnot en 1894, fut finalement expulsé de Suisse.


(7) Allez les gars : « Sans le GAM, la chanson francophone belge ne serait pas tout à fait pareille », peut-on lire sur internet sur ce
groupe de musique toujours actif. L’acronyme GAM signifie « Groupe d’action musicale », et cette chanson est
tirée de leur album « La vie est belle, maar ‘t gaat zo snel… 78-81 », sorti en 1981. Elle a été écrite en 1980 par
Michel Gilbert, membre du groupe, à l’occasion des nombreuses manifestations anti-nucléaires en Belgique
contre une centrale nucléaire française qui devait être installée près de la frontière.


(8) La danse des bombes : Paroles et musique de Michèle Bernard en 2007, d’après un poème écrit par Louise Michel pendant la Commune de Paris et faisant référence à la journée du 18 mars 1871, déclenchement de l’insurrection.

(9) Les archers du roi (version sans-papiers) : Reprise des «Archers du Roi» d’Albert Santoni (1960), cette version de la Bande à Rosa (Chorale d’Amiens) critique les politiques migratoires européennes. La chanson initiale décrivait les abus de pouvoir du roi,
transposables à tout président et à ceux qui détiennent le pouvoir.


(10) Bruceremo le chiese : Reprenant en partie la mélodie de l’« Inno dei lavoratori » composé en 1886 par le leader socialiste Filippo
Turati, « Bruceremo le chiese » date aussi vraisemblablement de la fin du XIXe siècle et est un classique de la
chanson anticléricale italienne. On notera dans les paroles la référence à Jean Meslier, curé précurseur de
l’athéisme en France, qui écrivait : « je voudrais que le dernier des rois fût étranglé avec les boyaux du dernier
prêtre ». Les deux dernières strophes évoquent quant à elles le destin de David Lazzaretti, « prophète » social qui
vitupérait le clergé dans la région de Monte Amiata en Toscane, et qui fût mis à mort par les carabiniers en 1878.


(11) Adieu paure Carnavàs : Chanson populaire d’Occitanie, « Adieu paure Carnavas » est basée sur un air d’Antoine Albanèse (compositeur
du XVIIIe siècle) intitulé « Que ne suis-je la fougère ». Si elle est traditionnellement chantée pour la crémation
du « Sa Majesté Carnaval » le premier jour du carême, elle invite aussi à renouer avec la tradition subversive
du carnaval comme révolte populaire et renversement de l’ordre établi. La version que nous chantons est celle
du libre et sauvage Carnaval de la Plaine (à Marseille), et les paroles évoquent notamment le politicard Jean-
Claude « Juan-Glaudi » Gaudin, ancien maire de Marseille corrompu et gentrificateur.


(12) Il galeone : « Il Galeone » est à l’origine un poème rédigé en prison en 1967 par Belgrado Pedrini (1913-1979).
Militant antifasciste et anarchiste de Carrare (Toscane), ce dernier purgea près de trente ans de prison
après la fin de la guerre, condamné par la République italienne pour avoir tué un flic du régime fasciste
qui essayait de l’arrêter en raison de ses activités au sein d’un groupe de partisans, mais avant les
débuts « officiels » de la résistance. C’est Paola Nicolazzi (1933-2014), sa compagne, qui mit le poème en
musique en 1974, sur l’air d’une chanson d’amour populaire, « Se tu ti fai monaca ».


(13) Soroode Zan : « Soroode Zan » (persan lit. « hymne de la femme ») est une chanson composée par l’iranien Mehdi
Yarrahi et aux paroles écrites par Mona Borzouei. L’hymne sort dix-huit jours après la mort de Mahsa Amini
le 16 septembre 2022, qui déclenche des protestations massives en Iran et dans le monde entier. Devenue
symbole de liberté en Iran, elle commence par le slogan « Femme, Vie, Liberté ». Alors que les plateformes
musicales sont interdites en Iran, la chanson a malgré tout été écoutée et téléchargée illégalement des cen-
taines de milliers de fois.


(14) La java des bons-enfants : « La java des Bons-Enfants » est parue en 1974 sur le célèbre disque situationniste « Pour en finir avec le
travail ». Ses paroles ont été rédigées par Guy Debord, bien que la pochette de l’album les attribuât alors par détournement à Raymond Callemin, l’un des membres de la « Bande à Bonnot ». Sur une mélodie de Francis Lemonnier, elles évoquent la bombe déposée le 8 novembre 1892 par l’anarchiste Émile Henry dans les bureaux parisiens de la compagnie des mines de Carmaux, dont les ouvrières·iers venaient de terminer une longue grève : déplacée dans le commissariat de la rue des Bons-Enfants, elle y explosa, faisant cinq morts.


(15) La révolte : Cette chanson est attribuée à Sébastien Faure (1858-1942), propagandiste anarchiste et pédagogue libertaire, qui l’aurait écrite en 1886. Depuis 1996, elle a été reprise par le groupe René Binamé, qui a légèrement adapté le texte. Cette version représente un mélange entre les deux textes, que nous avons à notre tour modifiée pour féminiser là où le rythme du texte le permettait et ajouter la mention du patriarcat parmi les principes à abattre.

(16) La vie s’écoule : En 1961, alors qu’il commence à participer aux activités de l’Internationale situationniste, le médiéviste
Raoul Vaneigem (*1934) compose ces paroles sur une musique de Francis Lemonnier (1940-1998). Le texte
évoque plusieurs thématiques importantes de la théorie situationniste : l’abolition des rapports sociaux
marchands et du travail, la dénonciation de la société du spectacle et la révolution de la vie quotidienne.


(17) Stornelli d’esilio : Sur la mélodie d’un chant populaire toscan, Pietro Gori – également auteur d’« Addio Lugano bella » –
écrit les paroles de « Stornelli d’Esilio » (« Ritournelles d’exil ») à la fi n du XIXe siècle, probablement alors
qu’il est lui-même exilé entre les pays du nord de l’Europe et l’Argentine. La première publication connue
du texte est réalisée en 1898 par le journal « La Questione sociale », édité par des anarchistes italien·ne·s
à Paterson, New Jersey, USA. Quelques alternances du masculin et du féminin ont été ajoutées dans notre
version pour coller avec les voix interprétant les différents couplets.


(18) Je suis fille d’Amazigh : Réécriture collective de la chanson « Je suis fille de marin » lors d’un atelier animé par Charlotte Bienaimé,
cette chanson a notamment été chantée à Nice en 2021 lors de la grande manifestation féministe transnationale
« Toutes aux frontières », contre les violences faites aux exilé·es et pour « une Europe sans muraille ».


(19) Bella ciao : « Bella ciao » est l’une des chansons militantes italiennes les plus connues et a souvent été reprise, devenant notamment le tube de l’été 2018… La version proposée ici est un mélange entre la version des « mondine » (les travailleuses des rizières de la plaine du Po), la version antifasciste (que nous avons féminisée à certains endroits) et une version féministe récente.